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Le 10 juin dernier, à Sept-Îles, une cinquantaine d’experts, professionnels et curieux de l’industrie se sont réunis pour une demi-journée riche en idées, échanges et découvertes. Deux conférences inspirantes et l’enregistrement d’un tout nouveau podcast sont venus mettre en lumière les défis, véritables catalyseurs d’opportunités, qui transforment la maintenance industrielle d’aujourd’hui.

Organisé par l’ITMI, le colloque sur la gestion d’actifs ayant comme thème : La technologie au service des bonnes pratiques, visait à rassembler les acteurs du milieu autour des enjeux actuels de la gestion d’actifs. Dans un contexte de transformation technologique et de rareté de main-d’œuvre, l’événement a mis de l’avant des initiatives concrètes et des solutions innovantes pour faire évoluer les pratiques sur le terrain. C’était également l’occasion de rappeler le rôle d’interface de l’ITMI entre la R&D et le terrain, en apportant des solutions concrètes à l’industrie. 

Pourquoi un colloque dédié à la technologie dans la maintenance industrielle ?

Les différentes interventions ont pu montrer que de nouveaux enjeux se définissent dans le secteur de la maintenance industrielle. Une pénurie de main-d’œuvre couplée à une pression économique entraîne de nouveaux besoins. On estime que 25 % des techniciens ont actuellement plus de 55 ans, avec 10 % de postes vacants. De plus, les interventions en urgence couvrent 20 à 40 % des interventions totales des techniciens, selon Martin Tremblay, directeur de la technologie et de l’excellence opérationnelle chez Aluminerie Alouette.  

Le secteur industriel est un vieux secteur dans le paysage économique de la côte nord. Celui-ci se doit de se moderniser, en exploitant le transfert de connaissances que peuvent apporter les nouvelles générations et les structures du bassin économique. Ainsi, les nouvelles technologies d’intelligence artificielle et d’automatisation peuvent apporter du renouveau dans un secteur exigeant. 

Convoyeur 4.0 : la vitrine technologique présentée

L’ITMI se place comme un intermédiaire entre ces nouvelles technologies et les besoins industriels, avec une réelle volonté de transfert technologique. De cette façon, trois employés, Colin Dabompré, Romain Baudouin et Kong-Solyvan Ear ont présenté les dernières avancées de l’ITMI autour du projet d’inspection automatisée des convoyeurs de minerais de fer. Le but? Développer une plateforme intelligente d’inspection fixe et mobile des convoyeurs miniers. La méthode pour atteindre cet objectif est diverse.  

Inspection automatisée des convoyeurs

La plateforme fixe : la « boîte orange »

La boîte orange est une carte électronique développée en interne, en collaboration avec Katak qui se chargera de la commercialisation du produit. En plus de ça, Katak aide les chercheurs de l’ITMI à s’équiper de capteurs grâce aux partenaires industriels de l’entreprise. L’expertise dans le secteur minier de ce partenaire de choix aide également les chercheurs. Cette carte est alimentée via Ethernet (PoE+) et elle regroupe des entrées analogiques et numériques. À bord de ce module, l’objectif est de retrouver des capteurs vibro-acoustiques, des capteurs de température. Le projet est toujours en phase de conception, mais l’avancement est concret, avec des premiers tests sur le terrain. Ces boîtes seront placées tout au long des convoyeurs pour identifier et relever des points d’échauffement ou des troubles. De plus, l’objectif est d’utiliser les sources de données existantes externes. La boîte serait reliée aux systèmes existants pour récupérer la vitesse du convoyeur, le débit de celui-ci (tonnage). Cela permettrait de récupérer également les systèmes de fournisseurs tiers, pour des scans BSMF (scan de la courroie du convoyeur) ou encore des caméras thermiques. En tout cas, l’objectif est clair : commercialiser le produit grâce à Katak, pour sortir la technologie du laboratoire de recherche et l’amener dans les entreprises du secteur industriel.

La plateforme mobile : spot et IA embarquée

C’est l’élément qui a fait lever les yeux du public durant le colloque. Un quatrième compère s’est invité sur la scène de présentation, Spot, l’un des deux chiens robots que possède l’ITMI. Ces robots vendus par Boston Dynamics peuvent être pensés comme des plateformes d’acquisition sur pattes. Spot est le prolongement de la boîte orange, pour affiner les mesures à un point plus précis identifié. Équipé de capteurs sur le dos, tel une tortue, Spot possède une caméra PTZ (Pan-Tilt-Zoom) permettant une vision quasi 360°, des capteurs de gaz, des microphones et un LIDAR. Le tout permet des mesures fines en temps réel, avec en plus un traitement par intelligence artificielle à bord de Spot. Il est ainsi capable de lire des écrans, du contenu textuel, et même des jauges. Ce volume de données est un enjeu important pour la prédictivité. 

Premiers résultats et roadmap pour les années à venir

Le projet d’inspection fixe et mobile des convoyeurs est un programme sur le long cours. Dès à présent, la précision est satisfaisante dans les mesures que réalisent la boîte orange et Spot. Un plan de collecte des données aidera à affiner les modèles d’intelligence artificielle de détection, en plus de la prédiction. De premiers algorithmes ont été développés pour de la prédiction, dont les résultats sont déjà concluants. Il est ainsi possible de prédire avec 12h d’avance la valeur qu’aura telle ou telle mesure. C’est un excellent premier pas pour la suite du projet. Ce projet aura un effet bénéfique certain sur l’industrie, avec une réduction des arrêts critiques, une amélioration de la sécurité et une optimisation des ressources énergétiques et humaines au quotidien. 

Selon les retours du terrain et des besoins des industriels, les équipes envisagent l’ajout de nouveaux capteurs à bord des deux produits. De plus, la quantité de données acquises sur une période qui s’allongera avec le temps permet des tentatives de corrélation multi sources pour des diagnostics prédictifs en amont. Pour l’heure, les employés de l’ITMI en charge du projet doivent se déplacer sur site pour opérer des modifications autour des produits installés dans l’environnement des convoyeurs. Cela s’avère contraignant, un banc convoyeur de formation est envisagé, permettant un double effet positif. Les chercheurs pourront expérimenter plus proche des laboratoires de recherche, tout en assurant une montée en compétence des étudiants-techniciens formés au sein du Cégep. Ce seront des techniciens plus rapidement opérationnels sur le terrain.  

Le défi de la relève en maintenance industrielle

Pour détailler les enjeux du gros défi de la relève générationnelle en maintenance industrielle, Martin Tremblay a fait part de son expérience en la matière. Sans rappeler les chiffres alarmants sur la pénurie de ressources humaines en cours et qui s’intensifiera, il reste néanmoins des solutions pour anticiper et améliorer la maintenance industrielle par la même occasion. 

Pour répondre à la pénurie directe de main-d’œuvre, l’enseignement et la formation sont des éléments clefs. L’enseignement, c’est tout d’abord d’attirer des personnes dans les formations professionnalisantes pour que la main-d’œuvre soit qualifiée et rapidement opérationnelle. Cela se fait dès les bancs de l’école, comme au Cégep de Sept-Îles. Toutefois, la formation initiale ne suffit pas, c’est une histoire de toute la vie professionnelle. Les formations par micro-apprentissages en employant les plateformes numériques comme des outils permettent des avancées plus rapides et d’obtenir un personnel plus qualifié. De petites vidéos sur son téléphone pour décrire comment répondre à une intervention bien précise est un bon moyen de procéder selon notre interlocuteur du jour. 

Relève en maintenance industrielle Martin Tremblay

Dans les locaux du Cégep et de l’ITMI, la technologie règne, mais aux côtés des techniciens également. L’un des gros gains en efficacité et sur les heures travaillées serait de réduire le temps d’intervention d’urgence : 

« On ne parle plus de réparer des équipements, mais de prédire, prévenir et optimiser avant même que la panne n’apparaisse. » ~ Martin Tremblay

C’est là tout le propos, en plus d’une main-d’œuvre plus compétente, celle-ci aura tout intérêt à anticiper plutôt que de réparer. Il vaut mieux prévenir que guérir. Ce sont des initiatives comme celle de l’inspection automatisée de l’ITMI qui permettront cela. La quantité de données ingérée par de tels systèmes permettra une meilleure anticipation et une plus grande efficacité des équipes. 

Entre deux maintenances, le nouveau podcast de l’ITMI

Rassurez vous, pas de divulgâchage ici, vous découvrirez le contenu du premier podcast de l’ITMI à l’automne. Toutefois, ce colloque a été l’occasion d’enregistrer sans filet le premier épisode du podcast Entre deux maintenances, avec Patrick Girard, directeur général chez Carbonité. Animé par Christopher Mitride, en compagnie d’Eric Sénéchal, les trois interlocuteurs ont pu développer, pendant près de 45 minutes, sur le sujet de la maintenance industrielle autour de l’expérience de l’invité du jour. Ensemble, ils ont su exploré la vision du directeur en matière de maintenance industrielle, dont le message clé était : pour que la maintenance progresse réellement, il est essentiel de créer un lien fort entre les employés sur le terrain et la direction. Car, même avec un budget en place, sans l’engagement des équipes ni leur sentiment d’être écoutées, les efforts risquent de rester vains.

Pour vous donner envie d’écouter ce premier épisode audio, une citation extraite de l’enregistrement :  

« L’IA ne remplacera pas les techniciens ; ce sont les techniciens qui sauront s’en servir qui remplaceront les autres. » 

– Patrick Girard

Colloque 2025 ITMI Podcast Entre deux maintenances

Un élan collectif pour l’avenir de la maintenance industrielle

Ce colloque aura été bien plus qu’un simple événement : un véritable tremplin pour la collaboration régionale. En réunissant des acteurs clés autour de défis communs et d’innovations concrètes, l’ITMI a renforcé sa position de chef de file en matière de transfert technologique. Les liens tissés, les idées échangées et les projets amorcés témoignent d’un écosystème industriel en pleine ébullition — et ce n’est qu’un début. Pour ne rien manquer des suites, restez à l’écoute… le podcast arrive bientôt!

Crédit photo: Lauriane Desormeaux